Cours Exercices Complements

2ème partie  -  Chapitre 4 :  Les instruments de l'étude des sons


Analyse fréquencielle des sons

Introduction

Au cours du chapitre précédent nous avons vu comment obtenir des sons complexes à partir de plusieurs sons simples. Nous allons maintenant étudier deux propriétés très importantes des sons :

  • Tous les sons peuvent se décomposer en une somme de sons plus simples ;
  • Cette décomposition spectrale peut être obtenue de manière automatique.

La décomposition fréquentielle des sons

Au début du XIXème siècle, Joseph Fourier, un mathématicien français travaillant sur le phénomène de conduction de la chaleur dans les solides, rédige les bases d'une théorie qui porte depuis le nom de décomposition en séries de Fourier. Cette théorie peut s'exprimer comme suit :
Tout signal périodique peut se décomposer en une série de composantes sinusoïdales.
Fourier propose en outre les outils permettant, à partir d'un signal complexe, de retrouver ces composantes spectrales. Ces outils mathématiques sont depuis appelés Transformation de Fourier.
Dans le chapitre précédent, nous avons vu des exemples de sons relativement complexes (jusqu'à trois composantes sinusoïdales). Dans le monde réel, les sons que l'on entend sont généralement bien plus complexes et ils peuvent avoir des dizaines de composantes sinusoïdales.

Par la suite, la théorie de Fourier a été étendue, et on est maintenant capable de décomposer n'importe quel signal (périodique ou non) en une série de composantes sinusoïdales. Cela signifie que tout son se décompose en une somme de sons simples.
Les sons périodiques et pseudo-périodiques se décomposent en un nombre fini de composantes. A l'inverse, les sons apériodiques se décomposent en un nombre infini de composantes. Cela signifie que lorsqu'on affiche la représentation spectrale d'un signal (obtenue par transformation de Fourier) deux cas se présentent :

  • S'il s'agit d'un son périodique, on obtient un spectre discontinu ou spectre de raies (seules certaines fréquences sont présentes dans le signal, toutes les autres fréquences ont une intensité nulle);
  • S'il s'agit d'un son apériodique, on obtient un spectre continu (toutes les fréquences sont présentes dans le signal, à différentes intensités).

En pratique, on obtient jamais un spectre de raies parfait et discontinu pour des raisons qui dépassent le cadre de ce cours. Une explication approximative est cependant fournie dans les compléments du cours. Même si le spectre de raies n'est pas parfait, certaines fréquences apparaissent nettement privilégiées par rapport aux autres comme le montre la figure suivante.



Dans le cas d'un signal périodique réel comme le son produit par la vibration d'une corde de guitare (schéma du haut), on constate que les composantes du signal sont régulièrement espacées et qu'il s'agit presque d'un spectre de raies (cf. le zoom du spectre). Les fréquences présentes sont discontinues (il n'y a pas de sinusoïde de fréquence intermédiaire entre les raies) et elles sont toutes séparées par un intervalle de fréquence constant. Cet intervalle est égal à la fréquence la plus basse présente dans le son : elle est appelée fréquence fondamentale et c'est elle qui détermine la hauteur du son : un la à 440 Hz est un son dont la fréquence fondamentale est de 440 Hz. Les fréquences plus élevées présentes sont appelées les harmoniques du signal (il s'agit d'un nom commun masculin).



Une autre caractéristique des sons : le timbre

En musique, plus un son comporte d'harmoniques, plus il est riche. Ce qui va différentier le la 440 produit par une guitare du la 440 produit par une autre guitare ou un piano est son timbre. Cette caractéristique est perçue de manière subjective (c'est-à-dire que deux individus ne désigneront pas forcément un même son comme étant clair ou sombre). Elle dépend de la répartition spectrale des harmoniques (l'intensité relative de chaque harmonique) :

  • Un son dont les harmoniques de basses fréquences sont les plus intenses sera dit sombre ;
  • Un son dont les harmoniques de hautes fréquences sont les plus intenses sera dit clair.



Dans l'exemple de la figure précédente, le la 440 produit par le piano est plus sombre que celui produit par la guitare acoustique avec des cordes en acier.
En comparant la répartition des harmoniques produits par les deux guitares, on constate que la corde en nylon produit des harmoniques de fréquences supérieures à 4 000 Hz très peu intenses, alors que le son produit par la corde en acier présente deux fortes harmoniques au delà de 4 000 Hz, en 4 400 Hz (9ème harmonique) et en 6 160 Hz (13ème harmonique). La présence de ces harmoniques aigües provoque la sensation de son plus clair que pour le son obtenu avec la corde en nylon ou la corde du piano.



L'enveloppe spectrale des sons non périodiques

Il arrive souvent que la répartition des fréquences dans le spectre soit plus utile que les caractéristiques individuelles de chaque fréquence (en particulier parce que l'oreille humaine décompose le son de manière plus grossière que l'analyse de Fourier). Cela est d'autant plus vrai que pour un son apériodique, toutes les fréquences sont plus ou moins présentes. dans ce cas, on préfère visualiser l'enveloppe spectrale du signal. Il s'agit d'une courbe indiquant grossièrement la répartition des fréquences sous forme d'une zone continue. L'exemple ci-dessous montre le spectre (en pointillés noirs) et l'enveloppe spectrale (en bleu ciel) de deux bruits ayant des enveloppes spectrales différentes (le bruit 1 est plus clair que le bruit 2).



Comment étudie-t-on les sons qui varient au cours du temps ?

Les schémas précédents représentent les variations d'intensité d'un son (axes vertical) en fonction des fréquences (axe horizontal). La dimension temporelle n'est donc pas représentée.
En fait, l'analyse spectrale est faite à un instant donné, et il serait plus correct de faire figurer sur chaque schéma : analyse fréquentielle du son à l'instant t. Lorsqu'il s'agit d'un son (comme la musique ou la parole) qui varie au cours du temps, l'information temporelle est essentielle car à chaque instant, les caractéristiques du son évoluent. On est donc amené à représenter les variations de fréquences et d'intensité en fonction du temps.


Le spectre d'un son qui varie dans le temps

Lorsque l'on perçoit qu'un son se modifie au cours du temps, cela signifie que les intensités des différentes fréquences présentes dans le signal évoluent au cours du temps. L'animation suivante donne un exemple de ce phénomène avec un signal pseudo-périodique.

Cette animation indique dans la fenêtre du bas le résultat de l'analyse spectrale du signal affiché dans la fenêtre du haut à l'instant matérialisé par le trait vertical. On constate que le signal est de type pseudo-périodique (spectre de raies) et que ces caractéristiques spectrales évoluent au cours du temps.

Un autre exemple est donné par la figure ci-dessous. Il s'agit de l'analyse spectrale du mot schéma (qui s'écrit en phonétique ) prononcé par un locuteur masculin.



L'étude acoustico-phonétique de la parole nécessite de pouvoir étudier l'évolution des spectres de fréquences des sons au cours du temps. La première représentation (sous forme d'animation) est particulièrement peu pratique. La seconde représentation (qui consiste à faire ce que l'on appelle des coupes spectrales à différents instants) est plus pratique, mais elle ne permet pas d'avoir une vision globale de l'évolution fréquentielle du son. On a donc développé une représentation de ces sons sous forme graphique non animée, appelée spectrogramme ou sonagramme, pour en faciliter l'étude.

L'analyse fréquentielle dans le temps : le spectrogramme (ou sonagramme)

Un son se caractérise par l'intensité des différentes fréquences présentes dans le signal à chaque instant. Si l'on veut représenter ces caractéristiques, il s'agit d'un graphique à 3 dimensions : 2 dimensions pour le spectre (Intensité et Fréquences) et une dimension pour le temps. A chaque instant successif correspond une décomposition spectrale telle qu'on l'a vue précédemment.La figure suivante prend l'exemple d'un son simple (sinusoïdal) dont la fréquence diminue de 40 Hz à 20 Hz au cours du temps.



La représentation en 3 dimensions est graphiquement agréable, mais elle manque cruellement de précision, car il est difficile de rendre l'aspect 3D dans un schéma représenté en 2 dimensions (l'écran). Pour pallier cet effet, on a pris l'habitude de visualiser les spectres des signaux évoluant dans le temps par les spectrogrammes.

L'avantage d'un tel schéma est d'être plus lisible (avec un peu d'habitude !). Son inconvénient est d'être moins précis car l'oeil humain perçoît les différences de couleur de manière plus ou moins précises.
De manière générale, on utilise le spectrogramme, et quand on veut étudier précisément les fréquences et les intensités à un instant donné, on fait une analyse spectrale à cet instant.




L'analyse de Fourier permet de déterminer les composantes fréquentielles des sons.

Les sons périodiques se décomposent en une composante fondamentale (notée F0) et en plusieurs composantes harmoniques de fréquences multiples de F0.

Les sons apériodiques se décomposent en une infinité de fréquences.

La répartition des composantes (basse ou haute fréquence) donne son timbre au son :

  • Si les composantes les plus intenses sont en basses fréquences, le son est sombre.
  • Si les composantes les plus intenses sont en hautes fréquences, le son est clair.

    Pour étudier un son, on utilise plusieurs représentations spectrales :
  • La coupe spectrale (ou section spectrale) qui indique les intensités des fréquences présentes à un instant donné.
  • L'enveloppe spectrale qui indique grossièrement la répartition de l'intensité dans les différentes fréquences.
  • Le spectrogramme (ou sonagramme) qui indique sur une échelle de couleurs l'intensité des différentes fréquences au cours du temps.